QUÉBEC, le 23 janv. 2020 /CNW Telbec/ - Après examen du rapport produit par le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI) en lien avec les blessures subies par une femme le 28 décembre 2018 à Saint-Marc-sur-Richelieu, le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) conclut que l'analyse de la preuve ne révèle pas la commission d'une infraction criminelle par les policiers de la Sûreté du Québec (SQ).

L'examen du rapport d'enquête préparé par le BEI a été confié à un procureur aux poursuites criminelles et pénales (procureur). Ce dernier a procédé à un examen complet de la preuve afin d'évaluer si celle‑ci révèle la commission d'infractions criminelles. Le procureur a informé la personne blessée de la décision.

Événement

Le 28 décembre 2018, à 14 h 19, un jeune homme contacte la centrale 9-1-1 au sujet d'une chicane conjugale impliquant un homme en bris de condition et une femme tenant des propos suicidaires. Tous deux sont en rechute après une cure de désintoxication et sont fortement intoxiqués par l'alcool. L'endroit de l'appel est connu par les policiers de la SQ puisqu'ils sont intervenus à l'adresse en cause quelques jours auparavant, et ce, à deux reprises.

Alors qu'ils sont en route, les agents demandent l'assistance de collègues en vue de leur intervention en raison des propos suicidaires. Ils contactent également un centre de crise : les policiers obtiennent l'avis de transporter la femme à l'hôpital étant donné l'historique et l'état d'ébriété relatés. Une ambulance est demandée.

Les policiers arrivent sur les lieux à 14 h 48 et rencontrent le jeune homme ayant fait l'appel au 9-1-1, qui les informe de la situation. Ils procèdent à l'arrestation de l'homme en bris de condition. Alors qu'un agent sort à l'extérieur du domicile avec l'homme arrêté, l'autre policier demeure avec sa conjointe dont l'état de santé nécessite un transport à l'hôpital. Celui-ci informe la dame que le centre de crise a été contacté et qu'elle doit être amenée à l'hôpital. Elle se montre en désaccord et refuse.

Les ambulanciers arrivent à 15 h 11 sur les lieux. Réalisant cela, la femme s'agite et devient agressive envers le policier. Elle lance un téléphone sans fil en sa direction, mais ne l'atteint pas. L'agent essaie de la retenir en lui bloquant le chemin. Elle le frappe sur la joue gauche avec son bras droit. Le policier tente de la maitriser physiquement. Il se situe derrière elle. Il saisit son bras droit et l'amène derrière son dos. À ce moment, la femme tombe au sol vers l'avant, suivie du policier. Elle s'érafle le visage sur une armoire de cuisine et se cogne la tête sur la céramique du plancher.

Les ambulanciers prennent en charge la femme. Elle est mise en état d'arrestation pour voies de fait contre un agent de la paix. Elle est menottée et se calme. Il y a du sang sur le plancher. La femme a une blessure sur le côté droit de la tête, en plus d'une ecchymose sur le genou gauche et le bras droit. Peu après, elle perd connaissance. Les ambulanciers la couchent sur le plancher et un policier lui retire les menottes. Elle reprend ensuite conscience, mais semble confuse. Les ambulanciers l'aident à se lever pour s'asseoir dans une civière-chaise et la transportent dans l'ambulance. Elle est ensuite transportée à l'hôpital.

Dans le cadre de cet évènement, la femme a dû répondre à des accusations. Il y a eu déclaration de culpabilité pour un chef d'agression armée contre un agent de la paix et arrêt conditionnel des procédures pour l'autre chef de voies de fait contre un agent de la paix.

Analyse du DPCP

Dans la présente affaire, le DPCP est d'avis que les conditions énumérées à l'article 25 du Code criminel sont remplies. 

Cette disposition accorde une protection à l'agent de la paix qui emploie la force dans le cadre de l'application ou de l'exécution de la loi.

Le paragraphe 25(1) accorde une protection à l'agent de la paix employant la force dans le cadre de l'application ou l'exécution de la loi, pourvu qu'il agisse sur la foi de motifs raisonnables et qu'il utilise seulement la force nécessaire dans les circonstances.

Il peut s'agir, notamment, d'une arrestation légale, ou encore de manœuvres visant à désarmer une personne ou à maîtriser une personne en crise, en raison du risque qu'elle représente pour elle-même ou pour autrui.

Le paragraphe 25(3) précise qu'un policier peut, s'il agit sur la foi de motifs raisonnables, utiliser une force susceptible de causer la mort ou des lésions corporelles graves s'il croit que cela est nécessaire afin de se protéger ou encore de protéger les personnes sous sa protection contre de telles conséquences.

Les policiers, étant agents de la paix, sont donc autorisés à employer une force qui, dans les circonstances, est raisonnable et nécessaire pour exercer leurs fonctions et qui n'est pas excessive.

Les tribunaux ont établi que l'appréciation de la force ne devait toutefois pas être fondée sur une norme de perfection.

En effet, les policiers sont souvent placés dans des situations où ils doivent rapidement prendre des décisions difficiles. Dans ce contexte, on ne peut exiger qu'ils mesurent le degré de force appliquée avec précision.

Dans ce dossier, l'intervention policière était légale, tant à l'endroit de l'homme que de la femme. En lien avec l'intervention à l'égard de la femme, le centre de crise contacté par les policiers leur avait clairement indiqué d'amener cette dernière à l'hôpital, conformément à la Loi sur la protection des personnes dont l'état mental présente un danger pour elles-mêmes ou pour autrui1. Une fois l'ambulance arrivée sur les lieux, la femme est devenue en état de crise et s'est montrée agressive physiquement envers l'agent en cause. Compte tenu de ces circonstances, le policier avait des motifs raisonnables d'estimer que la force appliquée à l'endroit de la femme était nécessaire pour sa protection contre des lésions corporelles graves.

Conséquemment, le DPCP est d'avis que l'emploi de la force par les agents de la paix était justifié en vertu de l'article 25 du Code criminel. L'analyse de la preuve ne révèle pas à son avis la commission d'un acte criminel par les policiers de la SQ impliqués dans cet événement.

Le Directeur des poursuites criminelles et pénales

Le DPCP fournit, au nom de l'État, un service de poursuites criminelles et pénales indépendant, contribuant à assurer la protection de la société, dans le respect de l'intérêt public et des intérêts légitimes des victimes.

Chaque dossier soumis au DPCP est analysé avec rigueur et impartialité. La norme qui guide les procureurs concernant l'opportunité d'entreprendre une poursuite est prévue à la directive ACC-3. En droit criminel, le fardeau de la preuve que doit satisfaire la poursuite est très exigeant. En raison du principe de la présomption d'innocence, la poursuite doit en effet faire une démonstration hors de tout doute raisonnable de la culpabilité de l'accusé devant le tribunal.

La décision de poursuivre ou non est une décision discrétionnaire prise par le procureur dans l'exécution de ses obligations professionnelles sans crainte d'ingérence judiciaire ou politique et sans céder à la pression médiatique. Par ailleurs, ce n'est pas la tâche du procureur de se prononcer sur une possible faute civile ou déontologique. Il ne cherche que les éléments lui permettant de conclure qu'un acte criminel a été commis et de déterminer s'il peut raisonnablement en faire la preuve. Il ne lui appartient pas non plus de formuler des commentaires ou des recommandations concernant les méthodes d'intervention policière.

La publication des motifs qui étayent la décision de ne pas porter d'accusation dans certains dossiers revêt un caractère exceptionnel et s'appuie sur des lignes directrices.

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1

Loi sur la protection des personnes dont l'état mental présente un danger pour elles-mêmes ou pour autrui, RLRQ, chapitre P-38.001.

 

Consulter le contenu original : http://www.newswire.ca/fr/releases/archive/January2020/23/c9220.html Cet hyperlien s'ouvrira dans une nouvelle fenêtre.

Dernière mise à jour : 23 janvier 2020