QUÉBEC, le 15 sept. 2021 /CNW Telbec/ - Après examen du rapport produit par le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI) en lien avec les blessures subies par un homme le 4 octobre 2020 à Montréal, le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) conclut que l'analyse de la preuve ne révèle pas la commission d'une infraction criminelle par les policiers du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM).

L'examen du rapport d'enquête préparé par le BEI a été confié à un procureur aux poursuites criminelles et pénales (procureur). Ce dernier a procédé à un examen complet de la preuve afin d'évaluer si celle-ci révèle la commission d'infractions criminelles. Le procureur a informé la personne blessée de la décision.

Événement

Le 4 octobre 2020, un appel est fait au 911 à 6 h 46 par un pompier d'une caserne située sur le boulevard Rolland à Montréal concernant un homme devant la caserne portant un pyjama, des chaussettes et armé d'un couteau. L'homme est incohérent et prononce des propos menaçants. Plusieurs policiers se déplacent en véhicules de patrouille en direction de la caserne et ceux-ci arrivent sur les lieux dans les minutes suivantes. Les policiers sortent des véhicules et se positionnent en formation de demi-lune à une distance d'environ 30 mètres devant l'entrée principale de la caserne où se trouve l'homme, debout devant la porte. Celui-ci leur fait dos et parle, s'adressant vraisemblablement à une ou des personnes derrière la porte de l'entrée principale. Les policiers ne sont pas en mesure d'entendre ce que dit l'homme.

Un policier tente une approche verbale avec l'homme. Celle-ci s'avère infructueuse. Le policier fait ensuite une demande sur les ondes radio pour l'assistance d'un duo ayant l'arme à impulsion électrique (AIE) et un autre duo possédant l'arme intermédiaire d'impact à projectiles (AIIP). Un policier et une policière se trouvent à gauche de la caserne dans une petite section gazonnée. L'un d'eux se trouve à environ 30 mètres de l'homme et l'autre à environ 20 mètres de celui-ci.

Soudainement l'homme se retourne, fait quelques pas et court rapidement. Il traverse l'entrée asphaltée, toujours armé de son couteau, en direction du policier et de la policière. La policière lui crie plusieurs fois de lâcher son couteau. Voyant que l'homme continue sa course armé du couteau et craignant pour leur vie, ils font feu à quelques reprises. L'homme tombe ensuite à quelques mètres des agents sur la partie gazonnée. Les images captées par l'une des caméras de surveillance de la caserne permettent de voir la séquence où l'homme court vers le policier et la policière ainsi que les tirs de ceux-ci à son endroit.

Afin d'assurer leur sécurité, avant d'approcher l'homme au sol, des policiers tentent de repérer le couteau près de l'homme, sans succès. L'homme est conscient et non coopératif. Il s'écoule quelques minutes entre le moment où l'homme tombe au sol et celui où les policiers tirent celui-ci chacun par un bras pour l'éloigner de quelques pieds sur le terrain de l'immeuble voisin, toujours au sol, puisque le couteau demeure introuvable. Le couteau est alors découvert  sous l'homme.

L'homme, atteint par balles, a subi diverses blessures. Après avoir été menotté, il est pris en charge par des pompiers qui agissent à titre de premiers répondants. Une ambulance arrive rapidement et il est transporté dans un centre hospitalier pour y recevoir les soins nécessaires.

L'un des pompiers a subi des blessures mineures à une jambe. Elles ont vraisemblablement été occasionnées par des éclats de projectiles, trois d'entre eux ayant traversé deux des trois portes de garage de la caserne.

Analyse du DPCP

Dans la présente affaire, le DPCP est d'avis que les conditions énumérées à l'article 25 du Code criminel sont remplies. 

Cette disposition accorde une protection à l'agent de la paix qui emploie la force dans le cadre de l'application ou de l'exécution de la loi.

Le paragraphe 25(1) accorde une protection à l'agent de la paix employant la force dans le cadre de l'application ou l'exécution de la loi, pourvu qu'il agisse sur la foi de motifs raisonnables et qu'il utilise seulement la force nécessaire dans les circonstances.

Il peut s'agir, notamment, d'une arrestation légale, ou encore de manœuvres visant à désarmer une personne ou à maîtriser une personne en crise, en raison du risque qu'elle représente pour elle-même ou pour autrui.

Le paragraphe 25(3) précise qu'un policier peut, s'il agit sur la foi de motifs raisonnables, utiliser une force susceptible de causer la mort ou des lésions corporelles graves s'il croit que cela est nécessaire afin de se protéger ou encore de protéger les personnes sous sa protection contre de telles conséquences.

Les policiers, étant agents de la paix, sont donc autorisés à employer une force qui, dans les circonstances, est raisonnable et nécessaire pour exercer leurs fonctions et qui n'est pas excessive.

Les tribunaux ont établi que l'appréciation de la force ne devait toutefois pas être fondée sur une norme de perfection.

En effet, les policiers sont souvent placés dans des situations où ils doivent rapidement prendre des décisions difficiles. Dans ce contexte, on ne peut exiger qu'ils mesurent le degré de force appliquée avec précision.

Dans ce dossier, l'intervention auprès de l'homme était légale. Les policiers devaient intervenir auprès de l'homme armé d'un couteau afin de le désarmer puisque le comportement de ce dernier devant la caserne démontrait qu'il constituait un danger pour autrui.

La preuve révèle également qu'un des policiers a rapidement demandé que l'AIE et l'AIIP soient disponibles pour poursuivre l'intervention. Toutefois, les faits ayant mené aux coups de feu envers l'homme se sont déroulés très rapidement peu après l'arrivée des policiers. Il est manifeste que la course rapide de l'homme armé d'un couteau en direction du policier et de la policière démontre que la vie et la sécurité de ces derniers étaient menacées et qu'ils avaient des motifs raisonnables de croire que l'utilisation de l'arme à feu était nécessaire pour leur protection contre des lésions corporelles graves ou la mort.

Conséquemment, le DPCP est d'avis que l'emploi de la force par les agents de la paix était justifié en vertu de l'article 25 du Code criminel. L'analyse de la preuve ne révèle pas à son avis la commission d'un acte criminel par les policiers du SPVM impliqués dans cet événement.

Le Directeur des poursuites criminelles et pénales

Le DPCP fournit, au nom de l'État, un service de poursuites criminelles et pénales indépendant, contribuant à assurer la protection de la société, dans le respect de l'intérêt public et des intérêts légitimes des victimes.

Chaque dossier soumis au DPCP est analysé avec rigueur et impartialité. La norme qui guide les procureurs concernant l'opportunité d'entreprendre une poursuite est prévue à la directive ACC-3. En droit criminel, le fardeau de la preuve que doit satisfaire la poursuite est très exigeant. En raison du principe de la présomption d'innocence, la poursuite doit en effet faire une démonstration hors de tout doute raisonnable de la culpabilité de l'accusé devant le tribunal.

La décision de poursuivre ou non est une décision discrétionnaire prise par le procureur dans l'exécution de ses obligations professionnelles sans crainte d'ingérence judiciaire ou politique et sans céder à la pression médiatique. Par ailleurs, ce n'est pas la tâche du procureur de se prononcer sur une possible faute civile ou déontologique. Il ne cherche que les éléments lui permettant de conclure qu'un acte criminel a été commis et de déterminer s'il peut raisonnablement en faire la preuve. Il ne lui appartient pas non plus de formuler des commentaires ou des recommandations concernant les méthodes d'intervention policière.

La publication des motifs qui étayent la décision de ne pas porter d'accusation dans certains dossiers revêt un caractère exceptionnel et s'appuie sur des lignes directrices.

Cision Consulter le contenu original : http://www.newswire.ca/fr/releases/archive/September2021/15/c1881.html

Dernière mise à jour : 15 septembre 2021