QUÉBEC, le 30 oct. 2019 /CNW Telbec/ - Après examen du rapport produit par le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI) en lien avec les événements survenus à Trois-Rivières, lors desquels le décès d'un homme a été constaté le 31 juillet 2018, le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) conclut que l'analyse de la preuve ne révèle pas la commission d'une infraction criminelle par les policiers de la Sûreté du Québec (SQ).

L'examen du rapport d'enquête préparé par le BEI a été confié à un procureur aux poursuites criminelles et pénales (procureur). Ce dernier a procédé à un examen complet de la preuve afin d'évaluer si celle-ci révèle la commission d'infractions criminelles. Le procureur a rencontré et informé les proches de la personne décédée des motifs de la décision.

Événements

Le 5 juillet 2018, vers 19 h 45, l'homme se présente au quartier général de la SQ à Trois-Rivières afin de parler à un policier. Deux agents le rencontrent  dans leur voiture de patrouille stationnée à l'entrée du poste de police pendant près d'une heure. L'homme se plaint d'être suivi par des gens à bord de véhicules. Il n'est pas en mesure d'identifier les véhicules, les personnes changeant de véhicules. Il dit se sentir surveillé et victime d'appels répétés sur son téléphone. Les agents se renseignent sur sa santé mentale et sa prise de médication, mais à chaque fois que ce sujet est abordé, l'homme s'offusque et insiste pour dire qu'il n'est pas malade. Il indique aussi n'avoir aucun problème avec qui que ce soit et n'avoir aucun autre problème de consommation ou de jeu. L'information donnée par l'homme par rapport aux personnes qui le suivent est vérifiée sur le champ mais ne donne aucun résultat probant. On l'invite à prendre en note les numéros de plaque et la description de véhicules suspects.

Un des policiers propose à l'homme d'appeler au poste de police de la SQ de la MRC des Chenaux puisque ce sont eux qui desservent son lieu de résidence. Il lui donne aussi ses disponibilités au cas où il aurait besoin de le contacter directement. Les policiers tentent de le rassurer et le découragent de se procurer une arme pour se protéger après qu'il ait verbalisé ce souhait. Vérification faite par les policiers, ils constatent que l'homme n'a pas de permis d'acquisition d'arme. L'homme leur affirme qu'il n'a pas d'arme à feu. On lui suggère d'obtenir de l'aide de l'hôpital ou d'un centre local de services communautaires (CLSC), ce qu'il refuse de faire. Questionné sur sa famille, il dit habiter seul et « ne pas avoir personne ».

Un des agents constate que l'homme présente des signes de paranoïa et tient des propos incohérents et confus. Toutefois, à aucun moment, il ne verbalise ni ne sous-entend qu'il pourrait se faire du mal à lui-même ou à autrui. Il ne présente pas de traits dépressifs ou agressifs. Il est calme et situé dans le temps. Il a plutôt l'air apeuré, croyant que des gens le suivent.

Le 13 juillet 2018, vers 19 h, l'homme se présente à nouveau au quartier général de la SQ de Trois-Rivières pour rencontrer un des agents. Il lui remet un bout de carton sur lequel il a noté des plaques d'immatriculation ainsi que des descriptions de véhicules. L'agent procède aux vérifications des plaques en question dans le système de la SAAQ. Certaines plaques d'immatriculation correspondent aux véhicules décrits, mais aucun n'est suspecté ou impliqué dans une infraction criminelle quelconque.

Le 14 juillet 2018, vers 22 h 30, un des agents tente de contacter l'homme par téléphone à trois reprises, mais n'obtient aucune réponse. 

Le 15 juillet 2018, vers 21 h, l'homme se présente à nouveau au quartier général de la SQ de Trois-Rivières. Un des agents présent le 5 juillet 2018 rencontre l'homme. L'agent informe l'homme des résultats de ses recherches et que ces dernières furent négatives. Il lui répète que les patrouilleurs de la MRC des Chenaux demeurent disponibles s'il en ressent le besoin. L'agent tente à nouveau de discuter avec l'homme de son problème d'anxiété et lui demande s'il a débuté des démarches avec un CLSC près de chez lui, ce à quoi il répond non et qu'il n'est pas intéressé à le faire.

Le 23 juillet 2018, vers 10 h 45, le même agent se rend au domicile de l'homme pour lui signifier une copie d'un avis d'audition du 27 juillet 2018 pour une demande d'ordonnance d'interdiction préventive de possession d'armes. L'homme affirme comprendre la démarche et la raison qui la sous-tend. Il dit qu'il n'a pas l'intention de se procurer une arme à feu mais bien une tige ou un couteau pour se défendre le cas échéant.

Le 27 juillet 2018, l'homme comparait au palais de justice de Trois-Rivières relativement à l'ordonnance d'interdiction préventive de possession d'armes.  

Le 28 juillet 2018, l'homme rencontre son voisin et lui annonce qu'il ne le reverrait pas pendant un certain temps puisqu'il doit subir une opération chirurgicale à l'hôpital. Il lui laisse les clés de son domicile. Il signe par ailleurs une note datée du même jour dans laquelle il déclare qu'il laisse de l'argent comptant, ses meubles et tous ses objets à une de ses amies, mais cette note n'est pas remise aux policiers.

Le 29 juillet 2018, vers midi, l'homme est aperçu par son voisin alors qu'il est à bord de son véhicule.

Le 31 juillet 2018, vers 7 h 30, une agente qui arrive en voiture dans le stationnement arrière du quartier général de la SQ de Trois-Rivières fait la découverte du corps de l'homme qui est assis dans le siège du conducteur de sa voiture. Le corps est déjà en état de putréfaction. L'arme ayant servi à l'homme pour s'enlever la vie, de même que la douille vide, sont retrouvées à proximité du corps. 

Le rapport d'autopsie conclut que le décès est attribuable à un traumatisme crânio-cérébral secondaire à une décharge d'arme à feu tirée au front à bout touchant ou presque. Aucun autre signe de traumatisme n'est visible sur le corps de l'homme. Le rapport d'expertise en balistique conclut que la douille retrouvée dans le véhicule de l'homme fut percutée par le pistolet également retrouvé dans le véhicule.

Analyse du DPCP

La preuve au dossier révèle que les policiers ont fait tout ce qui était possible pour eux de faire pour aider l'homme dans ses démarches. Bien qu'il semblait souffrir de paranoïa, rien ne permettait aux policiers d'amener de force l'homme à consulter à l'hôpital. La Loi sur la protection des personnes dont l'état mental présente un danger pour elles-mêmes ou pour autrui permet à un policier d'amener, sans l'autorisation du tribunal, une personne contre son gré dans un établissement de santé dont l'état mental présente un danger grave et immédiat pour elle-même ou autrui ne pouvait trouver application. L'homme ne présentait pas un danger immédiat pour lui‑même ou les autres. Il était calme et réceptif lors de chacune des rencontres avec les policiers.

L'ensemble de la preuve est à l'effet que les policiers impliqués n'ont aucunement contribué au décès de l'homme. Rien ne pouvait laisser présager aux policiers qu'il était suicidaire ni qu'il présentait un danger. Il n'y a rien dans la conduite des policiers impliqués qui soit de nature à engager leur responsabilité criminelle.

À la suite de son analyse, le DPCP est d'avis que la preuve ne révèle pas la commission d'un acte criminel par les policiers de la SQ impliqués dans cet événement.

Le Directeur des poursuites criminelles et pénales

Le DPCP fournit, au nom de l'État, un service de poursuites criminelles et pénales indépendant, contribuant à assurer la protection de la société, dans le respect de l'intérêt public et des intérêts légitimes des victimes.

Chaque dossier soumis au DPCP est analysé avec rigueur et impartialité. La norme qui guide les procureurs concernant l'opportunité d'entreprendre une poursuite est prévue à la directive ACC-3. En droit criminel, le fardeau de la preuve que doit satisfaire la poursuite est très exigeant. En raison du principe de la présomption d'innocence, la poursuite doit en effet faire une démonstration hors de tout doute raisonnable de la culpabilité de l'accusé devant le tribunal.

La décision de poursuivre ou non est une décision discrétionnaire prise par le procureur dans l'exécution de ses obligations professionnelles sans crainte d'ingérence judiciaire ou politique et sans céder à la pression médiatique. Par ailleurs, ce n'est pas la tâche du procureur de se prononcer sur une possible faute civile ou déontologique. Il ne cherche que les éléments lui permettant de conclure qu'un acte criminel a été commis et de déterminer s'il peut raisonnablement en faire la preuve. Il ne lui appartient pas non plus de formuler des commentaires ou des recommandations concernant les méthodes d'intervention policière.

La publication des motifs qui étayent la décision de ne pas porter d'accusation dans certains dossiers revêt un caractère exceptionnel et s'appuie sur des lignes directrices.

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Dernière mise à jour : 30 octobre 2019