Politique nationale de l’architecture et de l’aménagement du territoire: une démarche soutenue

Par Julie-Pier Gaudreault, urbaniste et coordonnatrice de la Politique nationale de l’architecture et de l’aménagement du territoire à la Direction des mandats stratégiques

Le gouvernement du Québec a dévoilé, le 6 juin 2022, la Politique nationale de l’architecture et de l’aménagement du territoire. Il s’agit d’un chantier majeur pour le ministère des Affaires municipales et de l’Habitation, qui demande une grande capacité d’adaptation. J’agis à titre de coordonnatrice de ce chantier d’envergure depuis le tout début, soit en janvier 2020. 

Pour réaliser ce mandat considérable, j’ai, dans un premier temps, réfléchi aux premières grandes lignes. Puis, pour en arriver aux résultats actuels, je l’ai structuré, en sollicitant l’expertise de mes collègues ainsi qu’en tenant compte des attentes et préoccupations d’une foule d’actrices et acteurs concernés par l’aménagement du territoire.

L’aménagement du territoire est un domaine vaste qui inclut de très nombreux points de vue et thématiques. Régulièrement, dans le cadre de mes différents mandats et dossiers, je collabore avec des collègues de plusieurs ministères et organismes du gouvernement du Québec. Pour assurer la concertation et la cohérence de la Politique, des comités rassemblant 23 ministères et organismes ont été créés à divers paliers décisionnels allant des sous-ministres adjoints au personnel professionnel.

Mon rôle est notamment de mobiliser mes vis-à-vis dans l’ensemble de ces organisations, de les guider dans la production des documents, mais également de mener les échanges nécessaires afin de répondre aux attentes des autorités et de régler le plus d’enjeux possible avant de faire cheminer les dossiers aux paliers supérieurs. C’est un type de tâche que j’apprécie particulièrement: il faut souvent faire preuve de créativité et d’ouverture pour trouver les bons compromis. La préparation et le suivi des nombreuses rencontres de ces comités ministériels constituent également une grande partie de ma mission de coordination. Heureusement, je suis soutenue par des collègues très efficaces.

Le premier défi auquel notre équipe s’est attaquée a été de faire un état de la situation de l’aménagement du territoire au Québec afin d’identifier différents thèmes et enjeux qui ont servi d’orientations préliminaires. Pour ce faire, plusieurs professionnelles et professionnels du Ministère et des autres ministères et organismes ont été sollicités afin de documenter différentes thématiques en fonction de leurs expertises variées. Cette première étape a nécessité des mois de travail autour de l’été 2020. Mon rôle était essentiellement de m’assurer de l’avancement du travail des équipes en les accompagnant dans leurs réflexions et en ciblant les enjeux à approfondir. En restant ainsi bien informée des contenus produits, je pouvais m’assurer de la cohérence des travaux et éviter les répétitions.

Pour bonifier nos analyses, des expertes et experts ont été invités à présenter des séminaires sur des thématiques liées à l’urbanisme et à l’aménagement du territoire. Nous avons aussi demandé la collaboration de l’École nationale d’administration publique pour mener une douzaine de laboratoires d’innovation publique sur autant de thématiques. À cette étape, repérer l’ensemble des associations et organismes nationaux de tous les horizons à couvrir fut un beau défi. Ce type de consultation était une première pour notre équipe. Ces journées d’échanges visant à proposer des solutions aux différents problèmes et enjeux furent très enrichissantes. Au total, ce sont plus de 80 organisations qui ont pris part à ces laboratoires pour nourrir nos réflexions.

Enfin, un comité consultatif composé d’organismes municipaux et de la société civile œuvrant à l’échelle du Québec dans l’ensemble des sphères liées à l’aménagement du territoire a été mis sur pied. Ce comité a été consulté à chacune des étapes de l’élaboration de la Politique afin de formuler des recommandations.

L’ampleur d’un tel chantier, impliquant un grand nombre d’actrices et acteurs ayant des opinions ou des visées différentes en vue de la définition de la vision stratégique que propose la Politique, a nécessité beaucoup de flexibilité. Il nous a fallu être agiles pour nous adapter tout en gardant le cap sur les grands enjeux ciblés, et ce, afin de répondre aux attentes et aux préoccupations de l’ensemble des parties prenantes. J’en ressors grandie professionnellement et convaincue d’être entourée d’une équipe exceptionnelle. C’est précieux!

À la suite de la publication du document de consultation, à l’été 2021, nos travaux sont devenus publics, sous le nom de «grande conversation nationale». Ainsi, en plus des séminaires, des laboratoires et de la mise en place du comité consultatif dont je parlais plus tôt, les canaux de communication et les possibilités d’échanges ont alors été multipliés afin que soient entendus tous les partenaires et les organismes qui le souhaitaient, ainsi que la population, sur la vision, les orientations préliminaires et les leviers d’action proposés dans le document de consultation. Bien que cela ait permis une participation à plus large échelle des actrices et acteurs concernés, cette opération aura demandé beaucoup d’efforts à notre équipe qui, soulignons-le, n’avait pas d’expérience en consultations virtuelles au début de la pandémie! Nous avons également créé un questionnaire en ligne afin d’aller chercher le pouls de la population, avec qui nous interagissons généralement moins directement.

La ministre a, pour sa part, tenu des rencontres régionales dans le but de présenter le «Portrait de l’aménagement du territoire» et de récolter les commentaires. Ainsi, ce sont près de 270 représentantes et représentants du milieu municipal et d’organismes qui ont pris parole dans le cadre de ces rencontres virtuelles ayant eu lieu dans toutes les régions du Québec, entre juin et août 2021. Les Premières Nations et les Inuit ont aussi été consultés de manière distincte.

Nous avions le désir d’atteindre tout le monde et cela a été un défi de taille, non seulement pour orchestrer le tout mais, également, pour traiter, ensuite, les commentaires reçus en quelques semaines seulement. Une centaine de mémoires ont, en plus, été soumis et analysés pendant le processus. Somme toute, la participation importante aura démontré un grand intérêt envers cette démarche qui était attendue depuis longtemps.

Une fois la Politique publiée, le travail s’est poursuivi en 2022 et en 2023 afin de développer le plan de mise en œuvre qui, lorsqu’il sera rendu public, viendra concrétiser la vision portée par la Politique. Les vastes consultations menées dans le cadre de l’élaboration de la Politique ont permis d’identifier de nombreuses actions à entreprendre afin de répondre aux objectifs de la Politique. L’ensemble des ministères et organismes concernés ainsi que le comité consultatif ont poursuivi leur implication.